Pourquoi fouiller dans les affaires des autres ne sert à rien (en plus d'être puni par la loi)

Le piège du biais de confirmation

J'étais dans le train et j'ai assisté à la scène ahurissante d'un couple de jeunes qui, de l'autre côté du couloir, se chamaillaient pour fouiller dans le téléphone portable de l'autre, avec les conséquences que cela implique – toujours.

Les événements

Ils devaient à peine avoir 20 ans et la jeune femme a demandé à voir le contenu du téléphone de son copain. Pour se justifier, elle a prétexté qu'il avait, un jour, jeté un coup d'œil dans son historique WhatsApp et que ça ne serait que justice, après tout, de la laisser regarder.

Devant cet argument imparable, son copain s'est senti obligé de céder. Elle a donc regardé et, de fil en aiguille, son doigt a glissé – tiens donc ! – sur l'historique des photographies. Elle a pu constater qu'il avait encore des photos de son ex et lui a demandé de s'expliquer, ce que le jeune homme n'a pas pu faire de façon claire – car les photos semblaient dater de plusieurs années.

La discussion a fini en dispute et en bouderie.

Pourquoi est-ce inutile

Lorsqu'on fouille dans les affaires des autres, il y a 3 cas possibles : soit on trouve ce qu'on craignait, soit on ne trouve rien, soit il y a des choses étranges qui dépendent du contexte et de l'interprétation qu'on veut/peut leur donner.

Cas 1 : on trouve quelque chose

Le pire des cas. En plus de trouver ce qu'on cherchait – où de trouver quelque chose en fouillant pour une autre chose – on en déduit qu'on a bien fait de fouiller, ce qui renforce encore le besoin de fouiller car à chaque fois qu'on trouve quelque chose, on atteint un objectif et c'est un peu de dopamine qui est libérée. Cette dopamine est l'hormone la plus addictive qui existe. On n'a qu'une seule envie : recommencer, encore et encore.

Lorsque la vérité fait mal, elle n'annule pas pour autant l'effet de la dopamine et le soulagement d'avoir trouvé la vérité ne fait que renforcer notre comportement, la «recherche de la vérité». Au moins, on sait et on est rassuré car il n'y a rien de pire que le doute. Les parents ayant un enfant disparu et dont on n'a pas encore retrouvé le corps en savent quelque chose.

Cas 2 : on ne trouve rien

Il y a deux conséquences possibles : soit on est rassuré de ne rien trouver et, comme cette conclusion nous rassure, elle nous conforte donc dans notre action – à chaque fois que nous aurons un doute, nous aurons besoin de fouiller pour nous rassurer – soit on ne satisfait pas de ce qu'on pensait trouver et on en déduit « il/elle a effacé toutes les traces » – ce qui peut être le cas d'une personne qui a réellement des choses à se reprocher –, avec la ferme intention de recommencer pour tenter de le prendre sur le fait la prochaine fois avant qu'il/elle ait eu le temps d'agir. Ce n'est que partie remise.

Cas 3 : on trouve des choses, mais ce n'est pas clair

C'était le cas de mon couple du train. Le pauvre garçon avait conservé ou oublié de supprimer une photographie de son ex et il a dû se justifier sur le pourquoi du comment du parce que. Autant dire qu'il n'a pas réussi – et pour cause !

Dans tous les cas, on retombe dans le cas 1 ou 2 en fonction de l'interprétation qu'on voudra en avoir. L'expérience prouve que le bénéfice du doute ne profite presque jamais à l'accusé.

Conclusion

Quelle qu'en soit la raison, fouiller dans les affaires d'un autre est un piège, encore plus pour l'acteur que pour le sujet. Les conséquences ne peuvent aboutir qu'au désir de recommencer, encore et encore, ne serait-ce que pour se rassurer sous le faux prétexte de trouver « la vérité ».

En plus d'être inutile, ce besoin de chercher est un piège qui se referme lentement sur l'acteur, lequel ne peut qu'entrer dans un cercle vicieux : le besoin de contrôle. Et ce besoin de contrôle finit toujours par rendre malheureux. Il est prit à son propre piège : le besoin de fouiller dans les affaires d'un autre, en plus d'être interdit par la loi sans le mandat d'un juge, n'est généralement qu'un prétexte dont l'objectif n'est autre que de trouver ce qu'on cherche – ce qui finit toujours par arriver, tôt ou tard.

D'autre part, ce besoin dénote avant tout un manque cruel de confiance en soi et en l'autre qui ne permet pas de bâtir une relation de confiance saine avec une autre conséquence obligatoire : l'échec de la relation à moyen terme… et de toutes les relations qui suivront.

Dans tous les cas, ça ne sert à rien. Et ça n'excuse rien; la loi est très claire à ce sujet.