Covid-19, confinement et dominos

Pourquoi le confinement est contre-productif pour la santé

Le confinement a été la réponse de la plupart des pays face à la menace du Covid-19. Confinement imposé le temps de trouver un vaccin.

Mais ce confinement ne fera qu'empirer la situation parce que nous avons fermé tous les lieux considérés comme des foyers potentiels… et nous avons malencontreusement provoqué un effet domino que ni le confinement ni le vaccin ne pourront empêcher.

Pire : ils ne feront que l'aggraver.

Pourquoi le confinement ?

La mortalité du Sras-Cov-2 est, somme toute, limitée en comparaison d'autres maladies et problématiques communes. C'est essentiellement sa vitesse de propagation qui fait sa dangerosité. En se propageant vite, le nombre de malades augmente d'autant, saturant les services de santé et provoquant un effet domino, les malades du Sras-Cov-2 utilisant les ressources limitées des hôpitaux à prendre en charge les autres patients en parallèle.

Pour limiter cette propagation, la méthode la plus efficace que nous connaissons – pour l'appliquer depuis que nous faisons face à des épidémies – est la mise en quarantaine. Cette dernière s'est traduite par un confinement général et généralisé.

Plus question de sortir de chez soi sans une bonne raison. Plus question d'aller au restaurant ou au cinéma. Pas même la possibilité de se rendre sur son lieu de travail – excepté pour les services essentiels.

Cette méthode a été très critiquée. Cette liberté de circulation et de vivre a été vécue comme une violation insupportable des droits humains les plus élémentaires.

Mais, la crise du Covid et le confinement qui ont suivi ont occupé le devant de la scène, occultant d'autres problématiques plus meurtrières, les empirant même par un autre effet domino.

Les plus gros problèmes du Covid ne sont pas derrière nous, mais devant.

Paradoxe du confinement

La productivité des pays occidentaux repose sur deux piliers essentiels : l'instruction et la santé.

L'instruction pour former le plus possible d'experts dans leur domaine, ces derniers créant emploi, brevets, … Tout ce qui est nécessaire pour soutenir une activité économique dynamique.

La santé afin de disposer de travailleurs à longue durée et vie, travaillant donc longtemps, remis rapidement sur pied en cas de problème. Disponibles plus souvent et plus longtemps, ils gagnent ainsi plus d'argent et paient plus d'impôts en conséquence.

En fermant les écoles et en empêchant les travailleurs de travailler, nous avons supprimé l'intérêt de l'instruction et du système de santé.

Pour respecter la philosophie originelle, il aurait fallu, au contraire, laisser les écoles ouvertes et organiser la continuité de l'activité professionnelle des travailleurs.

Mais cette problématique n'est pas le sujet.

Les effets du confinement

Le confinement a modifié notre façon de vivre, tant dans notre rapport aux autres qu'à nous-mêmes.

Diminution de la dépense énergétique

Nous nous sommes réjouis de la diminution des émissions de carbone fossile durant ce confinement. Les déplacements ayant été limités par la contrainte et une bonne partie des ressources fossiles étant utilisée pour les déplacements, la diminution des émissions était donc mécanique.

Cependant, si nous avons limité nos déplacements motorisés, nous avons également limité nos déplacements physiques.

Exemple : dans mon cas personnel, le simple fait de me rendre sur mon lieu de travail pour la journée est équivalent énergétiquement à un jogging d'une heure. J'ai donc compensé le confinement forcé par une heure de jogging en plus chaque jour.

Sociabilité et stress

De plus, nous sommes des êtres sociaux. Excepté certains rares individus capables de gérer la solitude sans sourciller, la plupart des individus souffrent de l'isolement à des degrés divers. Cette souffrance cause une augmentation du stress dans la plupart des cas.

Sauf que…

Sauf que le stress et le manque d'activité physique sont les deux causes principales de l'obésité.

Après la malnutrition, l'obésité est la seconde cause de mortalité dans le monde, loin devant le Sras-CoV-2. Même si la diminution des émissions de carbone fossile a entraîné une baisse de la pollution atmosphérique, elle-même également responsable d'une bonne part de la mortalité mondiale – on estime qu'elle est responsable à elle seule de 9% des morts prématurées –, elle restera quasiment sans effet sur le moyen et long terme.

Confinement et conséquences

Être confiné chez soi n'a pas empêché de tourner en rond, bien au contraire.

Condamnés à être enfermés, nous avons été empêchés non seulement de sortir pour nous divertir, mais aussi – et surtout – pour faire du sport : fermeture des salles de sports et des clubs; pas même la possibilité de jouer au foot en bas de son immeuble avec quelques amis, ni de s'adonner à son jogging quotidien.

Et lorsque le confinement n'était pas effectif, il était dissuasif par son atmosphère générale anxiogène devenant le seul et unique sujet, effaçant tous les autres.

En conséquence, le confinement a aggravé la problématique de l'obésité, soit par la diminution de l'activité physique, soit pas l'augmentation du stress. Certes, cette double conséquence a fait le bonheur des services de vidéos à la demande mais si nous en avons profité pour mieux nous divertir chez nous, nous n'en avons pas profité pour faire une cuisine plus saine ou pour nous remettre durablement au sport.

En empêchant les individus de circuler, nous avons interdit aux plus actifs de continuer leur activité physique, nous avons brisé dans leur élan ceux qui se remettaient au sport et nous avons aggravé la situation de ceux qui étaient déjà sur la mauvaise pente.

Or, en plus d'être responsable d'un grand nombre de décès prématurés, l'obésité est aussi un facteur aggravant de la fragilité au Sras-CoV-2, bouclant ainsi le cercle vicieux.

L'autre grand facteur aggravant est notre propre vision de la santé. Cette pandémie a mis en avant notre peur de la maladie par les virus et micro-organismes, masquant les autres causes majeures influençant durablement notre santé. Nous avons proposé le vaccin comme seule solution efficace, en oubliant les sujets de fond comme la diminution de la ration calorique, de la consommation de tabac, d'alcool et la mise en place d'une discipline pour affiner nos silhouettes en pratiquant des activités physiques et en reprenant le contrôle de nos assiettes.

Conclusion

En confinant les individus et en fermant les salles de sports, en interdisant même aux gens à sortir pour marcher ou courir, nous avons intensifié un effet domino commencé bien avant cette pandémie.

Nous leur avons expliqué comment porter un masque, garder des distances sociales, se laver correctement les mains, mais nous ne les avons pas encouragés à conserver une activité physique, en promouvant par exemple des exercices sans l'usage de poids ou d'un quelconque matériel. Nous n'avons pas non plus organisé la ré-ouverture anticipée des lieux d'activités sportives et des clubs de sport, les considérant comme non essentiels. Nous avons concentré tous nos efforts sur le système de santé alors que cette dernière passe également par une discipline quotidienne avec des effets beaucoup plus importants sur le long terme, en inversant les objectifs et les moyens.

Au lieu de cela, nous continuons de promouvoir une solution 100% vaccinale comme seule façon d'améliorer la situation, comme si, en dehors du Covid-19, nous n'avions aucun autre problème.

Le vaccin reste la solution largement médiatisée parce que la seule officiellement retenue très probablement par facilité, parce que nous voulons que la situation revienne rapidement à la normale, avec le moins d'efforts possible. Or, la problématique de l'obésité et du manque d'activité est une problématique de fond, sur le long terme, qui continuera de coûter des vies, encore plus après qu'avant.

Les problèmes que nous avions auparavant n'ont pas disparu et ils se sont même aggravés dans certains cas – en effet, si certaines populations ont profité du confinement pour reprendre leur santé en main comme c'est le cas en Italie, la situation s'est plutôt aggravée dans la majeure partie des cas.

La plus grave conséquence du Covid n'est pas sa mortalité directe, mais toutes les mortalités associées ainsi que les conséquences indirectes à venir, la sur-mortalité induite par la dégradation de notre santé déjà fragile.

Quand commencerons-nous à prendre enfin le sujet au sérieux ?

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